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Corruption au Togo : Bolloré reste mis en examen

Vincent Bolloré n’en a pas fini avec ses déboires judiciaires liés au Togo : la cour d’appel de Paris a annulé mardi une partie des pièces de l’enquête sur l’attribution de la gestion du port de Lomé entre 2009 et 2011, mais a confirmé sa mise en examen pour corruption.

Saisie par la défense du milliardaire français qui lui demandait d’annuler cette procédure qui bafouerait sa présomption d’innocence, la chambre de l’instruction de la cour d’appel a annulé certaines pièces mais confirmé le rejet d’une demande de placement de M. Bolloré sous le statut intermédiaire de témoin assisté, selon une source judiciaire.

M. Bolloré reste donc mis en examen pour corruption d’agent public étranger et risque en conséquence un procès pénal. Selon plusieurs sources proches du dossier, les pièces annulées faisaient référence à une tentative avortée de « plaider-coupable » (CRPC) en février 2021.

M. Bolloré et deux autres mis en cause avaient tenté d’éviter un long procès devant le tribunal correctionnel en négociant avec le Parquet national financier cette CRPC qui prévoyait une amende de 375 000 euros, rejetée par le tribunal pour qui la comparution des trois hommes en correctionnelle était « nécessaire ».

« C’est une première étape fondamentale pour la défense de Vincent Bolloré qui entend poursuivre dans cette voie », a commenté son avocate Me Céline Astolfe. « Si la cour d’appel a fait le choix d’effacer, comme le lui permet la procédure, ce plaider-coupable, le fort écho donné à cette CRPC ne permet pas à Vincent Bolloré d’être jugé de manière équitable », d’après elle.

« La justice sait reconnaître ses erreurs », s’est félicité Me Olivier Baratelli, autre avocat en défense, soulignant qu’elle avait « considéré qu’il y avait une atteinte à la présomption d’innocence de M. Bolloré ».

Pour Me Jérôme Karsenti, avocat d’Anticor et de Sherpa, parties civiles, « c’est une grande satisfaction de savoir que M. Bolloré va comparaître devant un tribunal indépendant et impartial pour être jugé pour corruption ».

Me Alexis Ihou, avocat des candidats malheureux à l’élection de 2010, Messan Agbéyomé Kodjo et Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson, parties civiles, a salué une « première victoire » qui ouvre la voie à un vrai procès dans lequel le président togolais Faure Gnassingbé est impliqué même si la procédure ne le vise pas formellement.

« Mes clients font confiance à la justice française, loin des pratiques d’une justice togolaise aux ordres de Faure Gnassingbé, l’ami de longue date de M. Bolloré », a-t-il déclaré.

Des juges financiers parisiens, saisis depuis 2013, soupçonnent le groupe Bolloré d’avoir utilisé les activités de conseil politique de sa filiale Euro RSCG – devenue Havas – pour décrocher frauduleusement la gestion des ports de Lomé et de Conakry (Guinée), au bénéfice d’une autre de ses filiales, Bolloré Africa Logistics, anciennement appelée SDV.

Selon des éléments de l’enquête consultés par l’AFP, les magistrats instructeurs, qui s’appuient notamment sur des flux financiers suspects mis au jour par Tracfin, concluent que « l’existence d’un pacte de corruption ressort des échanges de courriers » de 2009 entre MM. Bolloré et Gnassingbé, et qu’il a été « organisé par les plus hautes autorités du groupe ».

Selon ces éléments, M. Bolloré aurait demandé à Jean-Philippe Dorent, alors directeur international d’Euro RSCG, de fournir une prestation sous-évaluée à M. Gnassingbé lors de la campagne présidentielle de 2010, et aurait fait embaucher en 2011 un demi-frère du président, en contrepartie de divers avantages au groupe Bolloré et ses filiales, notamment l’allongement de la durée de concession pour le port de Lomé, des avantages fiscaux et la construction d’un troisième quai.

M. Bolloré, Jean-Philippe Dorent et Gilles Alix, directeur général du groupe Bolloré, sont mis en examen depuis 2018. Ils ont cependant obtenu en 2019 l’annulation de leur mise en examen pour une partie des infractions concernant la Guinée, pour cause de prescription.

En 2022, le groupe Bolloré a annoncé un accord avec l’armateur italo-suisse MSC pour la cession de ses activités logistiques en Afrique, branche emblématique du groupe qui emploie plus de 20 000 personnes et concerne plus de 20 pays sur le continent africain, notamment un réseau de 16 concessions portuaires, des entrepôts et des hubs routiers et ferroviaires.

AFP

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