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La Guinée, nouveau foyer de la contrebande de cacao en Afrique de l’Ouest

La Guinée, nouveau foyer de la contrebande de cacao en Afrique de l’Ouest

Longtemps confinée aux frontières du Ghana et de la Côte d’Ivoire, la contrebande de cacao gagne du terrain dans d’autres pays ouest-africains situés dans le bassin cacaoyer. Si le Togo, le Burkina Faso, ainsi que le Liberia font partie de cette liste, c’est toutefois la Guinée qui est au cœur des inquiétudes des autorités ivoiriennes.

Le 3 janvier dernier, l’Agence Reuters rapportait qu’environ 8 500 tonnes de cacao ivoirien étaient passées en Guinée de manière illégale le 24 décembre dernier. Cette situation qui pourrait faire sourire si elle n’était pas préjudiciable au premier producteur mondial de cacao est la dernière manifestation d’un trafic qui ne connaît aucun répit.

Un commerce de l’ombre nourri par le boom des prix mondiaux

Si le phénomène de contrebande n’est pas nouveau, il a pris depuis une ampleur inédite avec la hausse prolongée des cours de la matière première. Dopés par la mauvaise situation de l’offre mondiale depuis 2022, les prix du cacao ont monté en flèche en 2023 et la tendance s’est accélérée en 2024.

A New York, la tonne de fèves a successivement franchi la barre des 5 000 $ puis des 10 000 $, rendant en mars dernier ce produit plus cher que le cuivre, métal industriel phare et baromètre de l’activité économique mondiale.

La poussée de fièvre a atteint son paroxysme avec le niveau record de 12 931 $ la tonne atteint le 18 décembre dernier dans la foulée des préoccupations sur les conditions météorologiques dans le bassin cacaoyer ouest-africain et la perspective d’un 4e déficit consécutif sur le marché mondial du cacao.

Alors que sur ces principales places boursières, ce contexte a nourri l’activité des spéculateurs, il a aussi fourni un terreau favorable au regain des activités des trafiquants au niveau de la Guinée, qui jouent sur le différentiel de prix.

Si actuellement le tarif garanti en Côte d’Ivoire est de 1 800 FCFA par kg, ceux-ci peuvent ajouter entre 200 et 500 FCFA à ce montant pour convaincre les producteurs ivoiriens basés dans les zones proches de la frontière de céder leurs marchandises.

Une fois sur place, le cacao peut être vendu jusqu’à 5 000 FCFA à des intermédiaires qui se chargent de l’exporter illégalement vers des pays asiatiques comme l’Indonésie et Malaisie d’après Reuters.

Sur l’ensemble du dernier trimestre, des exportateurs interrogés par l’agence de presse estiment que 50 000 tonnes de cacao ivoirien ont traversé la frontière, ce qui représente au niveau actuel des prix, un manque à gagner d’environ 573 millions $ soit plus de 365 milliards FCFA pour la Côte d’Ivoire.

Selon Ousmane Attai, consultant indépendant sur le cacao qui se confiait à l’Agence Ecofin, en avril dernier, la Guinée représente une option particulièrement attrayante pour les trafiquants. En effet, contrairement au Liberia où le transport de cacao peut connaître des accrocs lors de son passage par le fleuve Cavally, frontière naturelle avec la Côte d’Ivoire, la Guinée bénéficie d’une longue frontière commune (610 km) avec cette dernière, qui offre plusieurs points d’entrées aux camions chargés de cacao.

Un nouveau casse-tête pour la filière ivoirienne

Le rôle de plus en plus important joué par la Guinée dans la contrebande dans le cacao a été tout au long de l’année écoulée une préoccupation constante pour les autorités ivoiriennes qui ont mis les bouchées doubles pour lutter contre le phénomène, en renforçant notamment les contrôles.

Si ce trafic reste difficile à enrayer, plusieurs points positifs sont déjà à noter. En octobre dernier, le Conseil du Café-Cacao (CCC) a mis la main sur 33 camions transportant environ 1 100 tonnes de fèves de cacao de contrebande à travers la frontière avec la Guinée.

Plus tôt en février, le régulateur avec le soutien de la police nationale a intercepté 3 camions transportant 1 500 sacs de cacao vers le même pays. D’une manière plus globale, les sorties de cacao ont de quoi donner des sueurs froides aux acteurs de la commercialisation intérieure qui doivent déjà faire face à la rareté des fèves sur le marché.

Dans le pays, les dernières prévisions tablent déjà sur 1,9 million de tonnes de cacao pour la campagne 2024/2025 contre un stock initial de 2,1-2,2 millions de tonnes anticipé au début de la saison en octobre.

Dans un tel contexte, la bataille fait rage entre les exportateurs pour collecter le maximum de cacao parfois au prix fort. Pour se procurer la fève sur le terrain, ces acteurs qui s’appuient sur les intermédiaires connaissent actuellement une hausse du coût d’acquisition de la matière première. En somme, jamais le cacao n’aura aussi bien mérité son surnom d’or brun. AP

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