Le secteur de l’éducation et de la formation frappé par la crise des apprentissages , la pénurie d’enseignants et une crise systémique qui met au grand jour son état de déliquescence, d’évanescence et de dysfonctionnement structurel symptomatiques du manque d’attractivité du secteur , de la démotivation des enseignants consubstantielles à la mauvaise politique éducative, à la gouvernance scolaire bancale et verticale , à l’absence totale d’une diversification des filières et d’une politique holistique de la profession enseignante est complètement ignoré dans l’élaboration du cadre juridique et institutionnel de l’avant-projet de la nouvelle constitution.
Or , nul n’ignore , que tous les pays qui ont amorcé leur décollage économique sont passés impérativement par la reforme du cadre juridique et institutionnel du secteur de l’éducation et de la formation avec pour finalité la revalorisation du capital humain.
C’est le cas des Quatre ( 04) Dragons Asiatiques (appelés par les anglophones : The four Asian Tigers) : la Corée du Sud, Taiwan, Hong Kong et Singapour. Ces pays ont connu une véritable révolution à partir des années 1960 qui les ont fait passer de pays du tiers-monde à un niveau de développement comparable à l’Europe de l’Ouest
Ces pays ont réussi à se développer rapidement grâce à une combinaison de facteurs tels que la stabilité politique, l’investissement dans l’éducation et la formation, la promotion de l’innovation et de la technologie, ainsi que l’ouverture au commerce international¹.
La Guinée peut apprendre de ces expériences pour son propre développement économique. La Guinée peut s’inspirer des politiques économiques mises en place par ces pays pour stimuler sa propre croissance économique.
Par exemple, notre pays peut investir dans l’éducation et la formation pour améliorer les compétences de sa main-d’œuvre et promouvoir l’innovation et la technologie pour stimuler la croissance économique.
Quel modèle économique nous voulons ?
Quelle école pour bâtir ce modèle économique ?
Qu’est-ce qu’il faut enseigner aux générations actuelle et future pour l’atteinte de ce modèle économique ?
Quelle place accorder à nos langues nationales ?
La Guinée est un scandale géologique , le château de l’Afrique occidentale, mais peine à amorcer son décollage économique du fait de la pauvreté de ses ressourcés humaines.
Pour inverser la tendance , il nous faut un cadre juridique et institutionnel bâti autour de l’école et du modèle économique que nous ambitionnons.
Loin de nous toute prétention à vouloir ramer à contre-courant des immenses efforts consentis par les honorables conseillers nationaux du Conseil National de la Transition ( CNT) et leurs experts que nous félicitons et remercions de passage, et sans vouloir aussi verser dans un mimétisme juridique et institutionnel via le décalque du modèle occidental pour le transposer à nos réalités socio-culturelles , nous souhaiterons la mise en place d’une autre institution républicaine spécifiquement réservée au secteur de l’éducation et de la formation.
Elle peut être appelée Haut Conseil de l’éducation, ( HCE ) le Conseil Supérieur de l’éducation. ( CSE)
Cette institution peut avoir un double rôle à la fois consultatif sur la politique éducative de la Guinée et disciplinaire à l’égard des personnels de l’éducation, voire des élèves et des étudiants; ainsi qu’un rôle de contrôle sur les établissements d’enseignement. et placée sous la présidence tournante des ministres chargés du secteur de l’éducation nationale et de la formation . À ce titre, il sera obligatoirement consulté sur tous les textes et les réformes qui régissent l’éducation. Il donnera aussi des avis sur tous les textes concernant l’enseignement privé.
En clair , elle sera appelée à émettre des avis sur:
- les objectifs et le fonctionnement du service public de l’éducation ;
- les règlements relatifs aux programmes, aux examens, à la délivrance des diplômes et à la scolarité ;
- les questions intéressant les établissements d’enseignement privés et les personnels de ces établissements placés sous contrat ;
- toutes les questions d’intérêt national concernant l’enseignement ou l’éducation, quel que soit le département ministériel concerné.
Les anciens ministres des trois sous – secteurs de l’éducation et de la formation, les associations des parents d’élèves et d’étudiants , les représentants des enseignants , les étudiants et élèves, les experts et spécialistes de l’éducation, et les administrateurs scolaires pourraient constituer l’ossature de sa composition.
Nous osons espérer que notre cri de cœur tombera dans les bonnes oreilles. Le problème guinéen réside dans la faiblesse de ses ressources humaines dont la revalorisation passe impérativement par l’école qui est de nos jours un gros corps malade dont il faut apporter un souffle nouveau et ce , dans un cadre juridique et institutionnel bien structuré , fonctionnel et pérenne. Seule une main-d’œuvre d’une expertise locale bien formée pourra aider ce pays à transformer sur place sa bauxite en alumine et en aluminium, son fer en métal etc. Et cela passe par la revalorisation du capital humain et la volonté de bâtir des institutions fortes autour de l’école productrice des ressources humaines qualifiées et de la main-d’œuvre locale.
La valorisation de nos langues nationale comme langues officielles et langues d’enseignement associées au français est aussi un passage obligé si nous voulons élaborer une constitution qui nous ressemble et nous rassemble. La chine, le Japon , les monarchies du golf persiques sont passés par là.
Sinon , on passera mille ans à signer des contrats miniers et à transporter nos minerais de bauxite et de fer vers les pays étrangers sans amorcer le moindre décollage économique d’autant plus que nous créons de la richesse et de l’emploi pour les autres .
Pendant ce temps notre intelligence est en friche . Or , « Confort sans efforts n’est que ruine de l’intelligence», dixit Joseph Ki- Zerbo.
Michel Pépé Balamou, secrétaire général du Syndicat National de l’Éducation ( SNE)